Paru le 28 février dans le New-York Times, un pénétrant article de Ross Douthat portait ce titre : « Russia-Ukraine conflict is a clash (choc) of civilizations ». Le mot civilisation au pluriel.
Parler de civilisation, c’est désigner une vaste entité où les parties la composant partagent des institutions, une religion, un art et une culture en principe communs.
Bruno Maçaes, essayiste et ancien secrétaire d’Etat aux affaires européennes de France, a introduit l’idée nouvelle d’un monde divisé en « civilization-states » (Etats-civilisations). Ce concept d’univers à part entière, influence déjà de nombreuses puissances montantes dont l’Inde, la Chine, laquelle, sous Xi Jinping, est opposée à toute influence occidentale.
Le maître du Kremlin songe-t-il à un unique modèle où le but ne serait plus la conquête du monde mais un « civilizational self-containment » (un confinement civilisationnel), soit une union politique et culturelle dans un espace soucieux de son indépendance même militaire ?
Dans cette guerre que Poutine fait aussi, à travers l’Ukraine, au monde européen qu’il juge totalement décadent, on doit parler de « civilizationism run amok » (d’un déchaînement de civilisation).
Mais qu’il s’agisse d’une guerre entre deux civilisations ou entre des « civilization-states », quelles différences quand les armes retentissent et tuent ?
Pouvait-on éviter le drame actuel ? Le maître de la Fédération de Russie, dès son arrivée au pouvoir, fut le président le plus pro-occidental et le plus pro-OTAN.
Les Européens n’ont pas su entendre ses appels tendant à un rapprochement.
Devenue impossible L’Europe de l’Atlantique à l’Oural, du général de Gaulle en 1959 ?
« Nous avons été stupides de ne pas arrimer la Russie à l’Europe et il est maintenant trop tard ! » disait récemment Luc Ferry, philosophe féru de géopolitique.
Poutine s’est tourné du côté de la Chine …